Au lendemain d’une finale qui les fit passer par tous les états d’âme et soumit leurs nerfs à une épreuve inouïe, comment se sentent les Français de tout poil? Du vieillard au minot, du footeux invétéré au supporter improvisé des grands soirs, tous partagent l’amertume des liesses avortées, une déception à la mesure de leurs regrets. Car des regrets, le scénario de la rencontre en engendra d’immenses, ce que n’a pas manqué de souligner Deschamps en zone mixte lorsqu’il évoqua l’exploit raté de si peu ( “C’est ce qui donne le plus de regrets. A deux-zéro si on en prend un troisième il n’y a rien à dire” ), sous-entendant qu’il eût préféré à ce supplice de Tantale une capitulation sans débat.

Si l’on ne reproche pas au sélectionneur d’exprimer à chaud sa rage d’être passé si près, on ne saurait cautionner cette façon de considérer un match à travers le seul prisme de son résultat. Pour la postérité, Mbappé le surhomme et son refus de la fatalité résisteront bien mieux à l’oubli que la déroute annoncée, si elle s’était confirmée. Ce sommet de cruauté laissera même probablement un souvenir plus marquant, des images plus fortes, une trace plus indélébile que le sacre d’il y a quatre ans.

Il ne s’agit là d’aucune tentative de se consoler ou même d’atténuer le chagrin. L’issue de cette finale nous écrase de frustration, c’est clair comme de l’eau de roche. Mais l’expérience de dimanche est l’occasion de rappeler qu’il est absurde de réduire le football à une histoire de résultat ; que sa grandeur réside dans sa capacité à plonger ses adeptes dans des états seconds. Une fois digéré l’échec, qui assurera encore qu’il eût préféré, un soir de décembre 2022, vivre une défaite clinique et dénuée de regrets plutôt que...