la revue
Nostalgie de l’inconnu Abonnés
Le 15 mai 2024
Supposé infranchissable, le rideau de fer a été beaucoup troué par le ballon rond. Ce qu’on voyait à travers était à la fois semblable et différent, familier et exotique, promesse d’une terre inconnue à découvrir.
Nostalgie de l’inconnu

La nostalgie, cette émotion douce-amère qui mélange regret du temps perdu et affection attendrie pour l’objet même des soupirs, porte par définition sur une époque ou des événements qui ont laissé des souvenirs positifs, peu importe qu’ils soient réels ou imaginaires, bien documentés ou embellis par une mémoire sélective.

Faut-il être tordu pour éprouver de la nostalgie pour le rideau de fer !

Pour regretter ce sinistre symbole d’une époque dont on a célébré la fin dans l’euphorie générale, il est vrai qu’il faut avoir un sacré penchant pour l’absurde.

Après tout, le rideau de fer, une métaphore popularisée par Winston Churchill dès 1945, évoque d’abord la brutalité grotesque du mur de Berlin et d’une frontière fortifiée, gardée par des soldats prêts à tirer sur les malheureux qui tentaient de la traverser.

Qui c’est, les meilleurs ?

Sinon que, dans le monde du football, ce prétendu rideau de fer, qui coupait le continent en deux, n’a jamais été imperméable. Il a été troué avec une déconcertante facilité dès le milieu des années 1950 sur l’initiative de quelques journalistes français résolus à réaliser leur rêve de compétition entre les meilleurs clubs européens – et accessoirement à remplir les colonnes de leur journal en milieu de semaine.

Ils n’avaient aucune visée politique. Il y a une douzaine d’années, j’ai passé deux après-midi passionnants dans le salon de Jacques Ferran, l’homme qui, à l’automne 1954, a jeté sur une nappe en papier les bases de cette nouvelle épreuve, faite de matchs aller-retour joués le mercredi, et une ébauche de règlement. Il a créé, un an et demi plus tard, le Ballon d’Or, autre récompense continentale. J’avais très envie d’y trouver des intentions subversives. Mais non, les garçons n’étaient motivés que par l’excitation enfantine de footeux qui veulent une réponse à cette question :...

Contenu réservé aux abonnés

75 % de ce contenu restent à découvrir !

Pour le consulter, vous devez vous connecter ou vous abonner.

commentaireCommenter