Qui peut placer Lorient sur une carte ? Rennes, on voit, Nantes, aussi, Brest, facile, c’est au fond à gauche, Quimper, à la limite, puisque c’est le terminus du TGV depuis Montparnasse. Mais Lorient, cette sous-préfecture du Morbihan (56) dont le chef-lieu est l’introuvable Vannes ? La ville a été entièrement détruite par les bombardements alliés pendant la Seconde Guerre mondiale parce qu’elle abritait les redoutables U-Boots allemands. Rien ne rend inoubliable la ville aux cinq ports mais sans charme. Si on était généreux, on parlerait de son plan orthogonal, de ses façades de béton et de son crachin de carte postale. Pour tout dire, se rendre à Lorient quand on ne fait pas partie des commandos marines qui y résident relève de l’exploration anthropologique, plus encore quand on débarque de la Côte d’Azur. Le choc est rude. La grisaille bretonne, la parka de rigueur et les bolées de cidre pour se donner du courage, tout cela est assez exotique. Face aux embouchures du Ter, du Blavet et du Scorff, la rade donne des envies de voyages. Mais pas ceux des autoroutes et des aéroports qui polluent nos paysages, ceux qu’on fait derrière des portes closes et vers des horizons intérieurs.

Depuis dix ans, un homme au visage juvénile mais à la démarche de circumnavigateur entretient à Lorient une relation personnelle (ainsi qu’une syntaxe parfaite) avec un art français qu’on pensait perdu pour toujours, le football. Directeur du centre de formation du club pendant dix ans, aujourd’hui entraîneur de l’équipe professionnelle avec le succès que l’on sait, il est connu autant pour ses performances que pour son élocution de prof de bio – mais un prof qui aurait décidé de prendre quelques libertés avec le programme du bac. Au diable les écrevisses à disséquer, la seule matière qui l’intéresse, ici,...