Combien de fois un supporter entend-il d’un parent ou d’un ami qu’il devrait prendre un peu de recul sur le football, ajoutant que vivre aussi intensément des émotions négatives pour un match perdu ou une élimination « finira par [le] bouffer » ? Et combien de fois ce supporter les écoute-t-il ?
Si le supporter est incapable d’entendre ces conseils, c’est qu’il estime que la souffrance a une valeur. Pas simplement la valeur des larmes ou de la rage, du désespoir et des cauchemars, ça, non ! Il s’agit plutôt d’un intérêt périphérique à ces douleurs. Quelque chose qui n’est pas palpable à l’instant T mais bien ancré dans son cerveau. Cet élément, c’est l’espoir. L’espoir de vivre des jours heureux.
Il est difficile, sans objectif, de concevoir la douleur liée au sport. Pourquoi accepter les coups de bâtons s’il n’y a pas en ligne de mire une carotte réconfortante ? Le supporter accepte de souffrir parce qu’il est en quête du bonheur, au-delà de toute autre considération légitime, liée à l’amour d’un club, à la passion pour des couleurs, à l’identification à un territoire, autant d’éléments qui créent un lien indéfectible entre un supporter et son équipe.
Dans les discussions d’après-match, le bonheur revient, inlassablement. Après une défaite, combien de fois le supporter s’exprime-t-il en ces termes : « On n’a jamais droit au bonheur, nous. » Voilà ce qui nous fait tenir : la joie au bout du tunnel et la célébration individuelle et collective. La multiplication des canaux de diffusion renforce ce sentiment : avec la jalousie qui monte lorsqu’un rival célèbre une victoire importante ou un trophée. Du bonheur, balancé en pleine face à travers des vidéos de fête.
Le tiroir à bonheur
Vient alors le désir d’être à sa place et de goûter au bonheur,...
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